Le
rapport du bloc d’empagement avec le format du papier, et le rapport
du gris typographique et du blanc des marges, donnent son esthétique à
un livre ou à une page.
NB.
Une vilaine mode se répand, qui oublie (ou plus probablement ignore)
2 000 ans de pratique du livre : selon certains, le
petit fond (le blanc à l'intérieur des pages, contre la reliure)
devrait être plus large et donc plus grand que le grand fond
(le blanc à l’extérieur des pages).
La
raison généralement invoquée pour justifier cette pratique, aussi
laide que dépourvue de sens, serait qu’il faudrait compenser la perte
apparente de papier due à la courbure qu’on peut observer dans les
premières et dernières pages de chaque cahier… Perte qui est pourtant
déjà compensée par l’imprimeur lorsqu’il fait l’imposition
des pages ! Le résultat est hideux, et pire : il gêne
la lecture. On aura à cœur, dans toute la mesure du possible, de
refuser énergiquement de procéder à de telles absurdités.
Une
autre mode, hélas, veut que le blanc de tête soit désormais
immensément plus grand que celui de pied…Faut-il ici rappeler que
c’est tout le contraire qu’il faut faire ? Passons sur le poids
optique du bloc de texte, la sensation qu’a l’être humain du centre de
la page, désormais on ne s’attarde plus à ces
« broutilles », mais au moins les néo-maquettistes
pouraient-il penser qu’on tient généralement un livre par en bas ou
par les côtés, parfois par les coins inférieurs, et jamais (ou alors
très rarement) par en haut ! Et qu’avec leur système, on a les
pouces qui cachent une partie du texte, empêchant de pouvoir lire ou
de regarder correctement les illustrations. Ah oui, bien sûr, il
s’agit ici de lecture et de respect du lecteur : le concept est
peut-être passé de mode.
Voici quelques méthodes d’empagement (voir également les autres pages Web de ce site qui traitent de cette question, à l'aide du moteur de recherche intégré dans le Sommaire).
Les
exemples sont ici basés sur un format A4, mais les calculs sont
identiques pour tous les formats de papier. Les doubles pages
reproduites ici sont réduites pour les nécessités de l’affichage. Tous
les calculs ou tracés sont effectués sur la page de droite, la page de
gauche étant sa symétrique.
Les
titres courants, folios, gloses marginales sont toujours considérés en
dehors du bloc d’empagement. Les notes de bas de page, en revanche, en
font partie.
Terminologie
Blanc de
tête : la marge en haut de la page.
Blanc de pied : la marge en bas de la page.
Petit fond : la marge intérieure.
Grand fond : la marge sur le bord extérieur du papier.
Les marges sont également appelées blanc tournant.
Source : Pierre DUPLAN & Roger JAUNEAU, Maquette et Mise en page, Éditions du Moniteur, Paris, 1986.
Ce
Canon est, dans ses deux versions « de luxe » et
« imprimé courant », basé sur la règle : 4/10, 5/10,
6/10, 7/10 d’un blanc B à répartir autour du bloc d’empagement. Ce
blanc B est égal à la largeur du papier moins la largeur de
la colonne.
Version de luxe :
La
justification fait les deux tiers de la largeur du papier, soit pour
un A4 : 14 cm.
B
= blanc à répartir, soit ici : 21 cm – 14 cm
(largeur de papier – largeur de colonne) = 7 cm.
Le
dixième de ce blanc est multiplié par 4, 5, 6 et 7 pour donner les
blancs tournants.
Blanc de tête = B / 10 × 5, soit ici 0,7 cm × 5
= 3,5 cm.
Blanc de pied = B / 10 × 7, soit ici 0,7 cm × 7
= 4,9 cm.
Petit fond = B / 10 × 4, soit ici 0,7 cm × 4
= 2,8 cm.
Grand fond = B / 10 × 6, soit ici 0,7 cm × 6
= 4,2 cm.
Imprimé
courant :
Le
calcul est le même, mais la justification fait les trois quarts de la
largeur du papier, soit pour un A4 : 15,75 cm.
B
= blanc à répartir, soit ici :
21 cm – 15,75 mm (largeur de
papier – largeur de colonne) = 5,25 cm.
Le
dixième de ce blanc est multiplié par 4, 5, 6 et 7 pour donner les
blancs tournants.
Blanc de tête =B / 10 × 5, soit ici : 0,525 × 5
= 2,625 cm.
Blanc de pied = B / 10 × 7, soit ici : 0,525 × 7
= 3,675 cm.
Petit fond = B / 10 × 4, soit ici : 0,525 × 4
= 2,1 cm.
Grand fond = B / 10 × 6, soit ici : 0,525 × 6
= 3,15 cm.
Les méthodes par division géométrique
Dans
les dessins ci-dessous, la pastille rouge indique le premier point
du tracé, les pastilles vertes indiquent les autres points utiles,
la pastille bleue indique le probable point riche de la page (départ
d’un chapitre, par exemple).
Division par 6 :
Méthode
employée par Marcus Vencentinus (XVe siècle)
pour un livre de prières.
(Source : Jan TSCHICHOLD,
Livre et Typographie, Éditions Allia, Paris, 1994.)
Méthode
proposée par le chevalier Villard
de Honnecourt (architecte français du XIIIe siècle).
(Source : Jan TSCHICHOLD,
Livre et Typographie, Éditions Allia, Paris, 1994.)
Division par 12 :
Elle
est basée sur la méthode précédente.
(Source : Jan TSCHICHOLD,
Livre et Typographie, Éditions Allia, Paris, 1994.)
La méthode d’Olivier Randier :
Les méthodes par division régulière des pages sont de simples opérations arithmétiques. On peut donc éviter le recours à la règle et au crayon :
X
étant la largeur de la page et Y sa hauteur, n le nombre de
divisions souhaitées (9 ou 12 dans les exemples proposés ici) et
v une constante (v = 2 dans le Canon de Honnecourt),
on a :
Blanc
de tête = Y / n.
Blanc
de pied = v × Y / n.
Petit
fond = X / n.
Grand
fond = v × X / n.
Soit en A4, avec n = 9 et v =2 :
Blanc
de tête = 29,7 cm / 9 = 3,3 cm.
Blanc
de pied = 2 × 29,7 cm / 9 = 6,6 cm.
Petit
fond = 21 cm / 9 = 2,33 cm.
Grand
fond = 2 × 21 cm / 9 = 4,66 cm.
v n’est pas
obligatoirement égal à 2. Dans une méthode qu’il a mise au point,
Olivier Randier utilise v = Y / X — qui donne d’excellents résultats
(même en A4 !)
(Source : Olivier RANDIER,
Mail à la liste Typographie, le 8 avril 2002.)
Méthode
due à l’Américain Jay Hambidge (XXe
siècle), elle est basée sur le Nombre
d’Or. Le folio se place sur l’axe du format du papier, et non
pas sur l’axe de la colonne.
(Source : Pierre DUPLAN
& Roger JAUNEAU,
Maquette et Mise en page, Éditions du Moniteur, Paris, 1986.)
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