Éloge
des liens, des liés et des lieurs
Un
essai en « néo-Poliphilus »
Pour ma Toute-Dorée, qui découvre avec ravissement
que la volonté passe parfois par l’abandon de soi.
Comment
le lieur est lié,
de Giordano Bruno. Composition en Poliphilus-MT, corps 24, 11,8 et 10, et en Blado corps 10. Format 10 × 16,6 cm. Août 2008. |
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« Le
labyrinthe est l’ultime figure du nœud. […]
Il relève ce qui se cache dans les entrelacs du nœud.
Mais à l’opposé de ce nœud inextricable il y a
le nœud simple à double boucle : le “lac d’amour”. »
Gérard BLANCHARD,
« Nœuds & esperluettes, Actualité
et pérennité d’un signe », Cahiers
Gutenberg n° 22, septembre 1995.
Il
est des textes qui vous poursuivent, parfois pendant des années :
ainsi pour moi, et peut-être pour moi seul, le livre de Giordano Bruno
sur
les liens et les ligatures (Des liens, aux éditions
Allia) tout en subtilités provocantes et en allusions parfois si
transparentes qu’on frémit d’y penser.
J’aime
les liens et les
ligatures — ce n’est pas un secret. Pour illustrer cette
attirance, je n’ai
pas voulu céder à la complaisance ni tenter d’imiter,
maladroitement peut-être, les travaux typographiques de nos confrères
de la Renaissance. De facture plutôt classique, mon petit Éloge
des liens, des liés et des lieurs se veut plutôt un tract,
peut-être une affichette — et surtout, je l’espère,
une incitation à la lecture du
livre dans son entier.
Notes
de travail
Ce
texte de Giordano Bruno (téléchargement
du PDF) a été composé en Poliphilus et en Blado (la police choisie
par Morison comme italique du Poliphilus). Le gris
obtenu s’avérant
un peu trop sombre pour un si petit format, l’interlignage
a été relâché à 12,8 points (alors que le Poliphilus-MT
autorise facilement un interlignage égal à la force de corps),
permettant également l’obtention
du carré qu’on voit ci-contre.
• Le format de la page (10 × 16,6 cm) est calculé à partir
de la série
de Fibonacci.
• La hauteur totale du bloc d’empagement (avec le titre et la
signature) est égale à la largeur de la page : 10 cm.
• Le colonnage du texte proprement dit (sans le titre ni la
signature) s’inscrit
dans un carré de 7 cm environ.
• La largeur des fonds (les marges de droite et de gauche) est
approximativement dérivée de la même série :
10 cm / 1,66 = 1,5 cm de large.
• Le blanc de tête (marge du haut) est deux fois plus petit que
celui de pied (marge du bas) : proportion de
1/3 – 2/3.
Hypnerotomachia
Poliphili (ou : le Songe de Poliphile) est
sorti des ateliers d’Alde
Manuce en 1499 : cet ouvrage est bien connu des amateurs
de typographie,
de bibliomanie
et de mystères.
La mise au point la moins incomplète que j’ai
réussi à trouver sur Internet à propos de ce livre se
trouve ici (en anglais, avec quelques liens vers d’autres
pages web).
Le
Poliphilus a été remis au goût du jour par Stanley
Morison (celui du Times
New Roman) en 1923 pour Monotype ; l’histoire
de cette résurrection a été racontée sur le blog
de Peter Gabor, où la notion même de refonte à l’identique d’un
caractère est à juste titre critiquée et démontée. De plus, la
version actuellement distribuée
par Linotype s’est tellement éloignée du dessin original de la
police et de celui Morison que de nos jours, on ne compose plus en
Poliphilus, mais dans un trop fade « néo-Poliphilus »… (Cliquer
ici pour voir un comparatif des différentes versions.)
Double
page du Songe de Poliphile (1499),
ici en très forte réduction.
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