Une
tragédie sentimentale
de la fin du XXe siècle
« Quand on
n’a plus rien à désirer,
tout est à craindre ;
c’est une félicité malheureuse.
La crainte commence où finit le désir. »
Baltasar GRACIÁN,
L’Homme de cour.
L’ouvrage
que je soumets ici à la critique et à la curiosité n’est pas un roman.
Les lettres contenues dans ce recueil se sont réellement échangées au
mois de mai 1999, sur une messagerie rose du Minitel, entre une
jeune femme (Florence) et un couple (Martine et Alain).
La
mise en pages, l’épreuve typographique, le passage en volume imprimé
ont été souhaités par les trois auteurs, les trois protagonistes de
cette étrange aventure sentimentale. Le Liminaire du texte
raconte l’histoire du livre : il suffira de télécharger le
PDF de ces Correspondances pour en prendre connaissance.
Choix typographiques
Confronté à l’impossibilité radicale de conserver « la graphie particulière du minitel, média froid et pauvre et pourtant parcouru de tant de brûlants frissons » (Liminaire), j’ai décidé du choix inverse : une mise en pages un peu précieuse, peut-être un peu pédante, mais adaptée à la nature épistolaire de l’aventure. Un côté Princesse de Clèves qui donne, tout au moins je l’espère, tout leur éclat à ces lettres. J’ai joué sur les contrastes, et sur la surprise du lecteur, afin de créer un vrai livre : choix de la police de caractères (le Baskerville de Monotype, corps 11, augmenté de ligatures légèrement incongrues dans ce contexte) ; le jeu des marges et des blocs (format de papier calculé d’après la série de Fibonnacci et empagement selon Hambidge) ; au sein de ces blocs d’un gris soutenu, l’irruption du demi-gras venant rappeler la provenance de chacune des lettres publiées.
Puis
le livre a été imprimé, à trois exemplaires (un par auteur). Enfin,
dès l’été 2001, j’ai prudemment commencé à en diffuser le fichier
PDF, auprès de quelques amis.
Thierry BOUCHE.
Une publication qui ne va pas de soi
Publier
un texte d’une nature si intime (même sur Internet, surtout sur
Internet) ne va pas de soi. Et c’est un acte d’autant moins évident
que ces Correspondances ont trois auteurs, indissociables,
et que je n’ai l’accord pour publication que de l’un d’entre eux.
Alors,
on voudra bien considérer que cette page Web est aussi un appel.
Martine, Florence, ou qui que ce soit d’autre qui puisse connaître
l’une d’entre elles, et qui par hasard lirait cette page… Le moindre
contact avec vous, une retrouvaille si ténue et lointaine fût-elle,
et bien entendu l’autorisation (ou le refus toujours possible) de
cette publication, me seraient infiniment précieux.
Carpaccio(s) et récits de rêves
Pour
ses Vœux 2000, Éric
Angelini diffusait auprès de ses amis un livre imprimé sur
de fines feuilles transparentes, elles-mêmes séparées par du
papier de soie et le tout emballé dans du papier boucherie. Le
texte reprenait un long débat à propos des carpaccios de viande et
de poisson, entamé sur un
forum électronique fréquenté par des gourmands.
Confrontés
à une même difficulté (soit : comment rendre compte sous forme
imprimée de ce qui se destinait à une lecture sur écran) les deux
typographes en charge du projet Carpaccio, J. A.
Noskoff et J.-P. Lacroux, ont pris un parti totalement différent
du mien — qu’au demeurant ils ne connaissaient pas.
Extrait
de Carpaccio.
Composition en American Typewriter,
Antique Olive et Bookman, corps 16 et 17.
Format : 22,65 × 22,54 cm.
Mais
les débats sur un forum électronique sont d’une nature un peu
spéciale : à mi-chemin entre l’écrit et l’oral ; à
mi-chemin, aussi, entre l’expression publique (le monde entier
peut lire ce que vous avez écrit) et le presque privé :
protégé par l’anonymat, mis en confiance par la proximité que l’on
ressent avec les autres intervenants, on s’y sent entre pairs…
Les différentes « voix » du débat sont ici restituées
par des polices de caractères différentes, donnant à chaque
intervention une couleur et une tonalité particulières, ainsi
qu’un rythme particulièrement joyeux.
J’ai
tenté, ailleurs sur ce site, de montrer tout autrement des récits
de rêves. On y verra peut-être la mise en forme
« spontanée » (et à vrai dire un peu retorse) de très
brefs et très intimes messages. C’est, dans tous les cas, une
présentation absolument à rebours de l’intention proprement
littéraire des Correspondances dont il est question
ici-même.
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